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29 mai 2024 Retour à la liste

Est-ce possible de notifier une mise à pied disciplinaire à un salarié protégé ?

La question porte bien sur une mise à pied disciplinaire et non une mise à pied conservatoire :

  • la mise à pied disciplinaire est une sanction consistant à suspendre le contrat de travail. Elle fait partie des sanctions « lourdes » affectant la rémunération du salarié. Dans les entreprises de plus de 50, cette sanction doit être prévue par le règlement intérieur.
  • la mise à pied conservatoire est une mesure d'attente, préalable à la sanction. Pour faire face à des situations de désordre, et dans l'attente d'une décision de sanction définitive, une mesure provisoire de mise à pied dite « conservatoire » peut être prise.

 

La protection dont bénéficient les représentants du personnel contre le licenciement ne les soustrait pas au pouvoir disciplinaire de l'employeur. Pendant l'exécution de leur contrat de travail, ils restent entièrement soumis, en qualité de salariés, au pouvoir hiérarchique du chef d'entreprise et peuvent faire l'objet d'une sanction disciplinaire en raison de faits constituant un manquement à leurs obligations professionnelles envers l'employeur. En revanche le salarié ne peut être sanctionné en raison de l'exercice de son mandat pendant son temps de travail sauf abus de sa part (Cass. soc., 1er juin 2022, n° 21-10.555).

Ainsi, il est tout à fait possible de notifier une mise à pied disciplinaire à un salarié protégé fautif sans solliciter l’autorisation de l’inspection du travail.

Toutefois, cette sanction modifie temporairement le contrat de travail (ce dernier est suspendu avec absence de maintien de rémunération), or il est de jurisprudence constante qu'aucune modification de son contrat de travail ou de ses conditions de travail (provisoire ou définitive) ne peut être imposée à un salarié protégé, y compris pour motif disciplinaire (par exemple pour une rétrogradation disciplinaire : Cass. soc., 3 mars 1999). Ainsi, l’employeur devra l'informer le salarié de sa faculté d'accepter ou de refuser cette mise à pied et du délai imparti pour faire connaitre sa réponse.

Le refus du salarié d’accomplir la mise à pied pourra alors justifier une démarche de licenciement disciplinaire (et l’employeur devra donc engager la procédure spéciale de licenciement : consultation éventuelle du CSE et saisine de l’inspection du travail).

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